« Bon, tu vas devoir trouver un VRAI travail maintenant ! »

Voilà ce que j’ai entendu lorsque ma carrière Olympique a pris fin en mai 2021.

Cette fin de carrière je l’ai vu arriver à grands pas.

Le covid. Le report des Jeux Olympiques de Tokyo. La fin de mon CDD au sein de la Marine Nationale. Un statut de réserviste accordé par la Marine Nationale. Une indemnité de 800 € par mois pour vivre. L’incohérence de mes revenus et de mon statut de Médaillé Olympique. L’angoisse du père de famille que je suis. Le ras-le-bol de prouver que je suis à ma place. La fatigue et le stress de cette situation. Clap de fin. Ma non-sélection pour les Jeux Olympiques. Un soulagement. Une envie de retrouver les miens. Le sentiment du repos du guerrier bien mérité. La remise de mon matériel à la Fédération Française de Voile. Aucun remerciement pour ma carrière accomplie. Tant pis. Plus de bateau. Juste une envie de repos.

La reconversion du Sportif de Haut Niveau, dite « petite mort », j’en avais déjà entendu parlé, notamment à travers les posts LinkedIn de Véronique Barré, réalisatrice du documentaire « Le sport, des médailles, et après ? ».

De ce fait, j’ai envisagé ma reconversion de manière très pragmatique, comme une reconstruction. Commencer par me reposer, accepter qu’il n’y a plus de challenge, que mon rythme de vie ne dépend plus des compétitions à venir, des objectifs de résultat. Profiter de ma fille qui m’a vu en pointillé depuis sa naissance. Et prendre le temps de me poser pour réfléchir à la suite.

Toutefois, je n’avais pas anticipé les réactions face à ma situation. J’ai souvent entendu : « Alors, c’est parti pour Paris 2024 ? Tu as arrêté, non ? Mais les prochains Jeux Olympiques sont à la maison… Tu ne vas quand même pas rater ça ? Et puis Athlète c’est le pied, tu es payé à faire du sport, il y en a plein qui rêveraient d’avoir cette chance ! Un métier passion c’est génial, tu ne te rends pas compte ! Tu vas découvrir la VRAIE vie maintenant ! Tu vas devoir trouver un VRAI travail ! Toi qui voyageais tout le temps, c’est fini ! Qu’est-ce que tu veux faire comme métier ? Pas simple ta situation, la récréation est terminée ! ».

Le fait d’enclencher une nouvelle vie, cela ne m’a pas effrayé. La nouveauté est une chose intéressante en soi.

En revanche, je fus surpris par cette sensation de deuil. Cette sensation de porter le deuil de ma carrière, mais pas seulement. Le sentiment que j’ai eu,  a été de devoir porter le deuil des autres. J’ai compris qu’à travers ma carrière Olympique, j’ai réalisé mon rêve de gosse, et celui des autres aussi. Je ne m’attendais pas à devoir porter le deuil du rêve des autres, ceux que j’ai emmené avec moi durant ces années de compétitions.

C’est à ce moment-là je crois, que j’ai réalisé à quel point le sport fait vibrer le monde. Et je crois que c’est à la fin de ma carrière Olympique que je réalise à quel point c’est fort !

Merci à tous ! Cela n’aurait pas eu la même saveur sans vous.